Rejet de candidature : la sanction d'une erreur évidente

  • 12/01/2012
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Si la question est simple, elle n’a pas fait pour l’heure l’objet d’une décision de principe. A l’occasion d’un pourvoi contre un arrêt rendu par une cour administrative d’appel, le rapporteur public, Nicolas Boulouis, a invité le CE à juger que le contrôle qu’exerce le juge de l’excès de pouvoir saisi d’une demande d’annulation de la décision de rejet d’une candidature est un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation.

«Depuis, l’arrêt du 16 juillet 2007, société TROPIC travaux signalisation, le recours pour excès de pouvoir (REP) contre les actes détachables est fermé pour les concurrents évincés, mais seulement à compter de la date de la conclusion du contrat» , rappelle le rapporteur public, Nicolas Boulouis. « Un REP est donc toujours possible si celui-ci a été enregistré avant la signature du marché », précise-t-il. Saisi d’un tel recours, le juge va exercer un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation, c’est-à-dire qu’il se prononce « sur l’erreur qui a pu entacher l’appréciation faite par l’administration lorsque cette erreur est évidente, lorsqu’elle pourrait être décelée par le simple bon sens ». Le rapporteur public poursuit en indiquant que le référé précontractuel est un instrument de contrôle calqué sur le recours pour excès de pouvoir. En effet, en matière d’allotissement, le Conseil d’Etat a déjà jugé que le magistrat opère dans le domaine un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation (1). Ensuite et sauf exceptions, la procédure de marché distingue l’examen des candidatures de la sélection des offres.« Lors de l’examen des candidatures, le pouvoir adjudicateur vérifie que le candidat n’entre dans aucun des cas d’interdictions de soumissionner et qu’il répond aux exigences minimales. De plus, aux termes du II de l’article 45 du code des marchés publics, le pouvoir adjudicateur peut exiger des certificats de qualité», observe Nicolas Boulouis.

Rejet de candidature : le contrôle de l’EMA

L’examen de la candidature repose donc, poursuit-il, sur des éléments objectifs, tels que les déclarations, et sur des éléments subjectifs, comme la surface financière, les moyens techniques, les références. Pour ces derniers, l’appréciation est plus délicate, plus difficile à contrôler de manière pleine et entière par le juge ». En l’espèce, la commission d'appels d'offres a rejeté la candidature de la société SGCAA au motif qu’elle ne détenait pas la qualification exigée Travaux Public 5500. Le tribunal administratif de Nice, après avoir relevé que la société a fourni de nombreuses références, dont certaines de nature comparable au marché envisagé, a annulé la décision de la CAO pour erreur manifeste d’appréciation (2). En appel, la cour administrative a confirmé l’annulation mais avec un contrôle plus poussé en considérant que, eu égard aux références et justificatifs produits, la personne publique a entaché sa décision d’illégalité en rejetant la candidature de la société SGCAA. En jugeant comme elle l’a fait, la cour a commis, selon le rapporteur public, une erreur de droit justifiant l’annulation de la décision. Nicolas Boulouis estime qu’en refusant la candidature, la personne publique a commis un faux pas dans l’appréciation de ses qualités techniques. En effet, de nombreuses références équivalentes de travaux réalisés ou en cours ont été fournies par la société SGCAA. Nicolas Boulouis propose donc à la Haute juridiction d’annuler la décision de la CAA et de rejeter le pourvoi de la commune de Six-Fours-les-Plages. Réponse du Conseil d’Etat dans quelques jours.


(1) Article 10 : le CE valide le recours au marché global
Allotissement : l’heure est à la détente
(2) TA Nice, 19 octobre 2007, société SGCAA, 0306032
(3) CAA Marseille, 20 décembre 2010, commune de Six-Fours-les-Plages, 07MA04879

Emmanuelle Maupin © achatpublic.info