Traçabilité des produits : l'avenir de la blockchain dans les achats publics

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Traçabilité des produits, sécurisation des contrats et gain de temps dans les process d’exécution, voici quelques unes des promesses du déploiement de la blockchain (ou chaîne de blocs) dans la commande publique. Encore au stade embryonnaire, achatpublic.info vous explique le concept et les enjeux de demain…

La blockchain, c’est quoi ? Elle serait vue comme une révolution technologique de la même ampleur que celle d’Internet, selon le rapport parlementaire du 12 décembre 2018 consacré à ce sujet. Elle apporte sur le plan matériel un niveau de sécurité hors pair. Créée à l’origine dans l’univers de la crypto monnaie il y a plusieurs décennies, le principe de la blockchain serait transposable dans d’autres domaines, dont la commande publique.
 

La blockchain quèsaco ?


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La blockchain n’est pas une finalité, mais un simple outil de sécurisation

Il ressort du rapport parlementaire du 12 décembre 2018 que la chaîne de blocs « est un registre, une grande base de données qui a la particularité d’être partagée simultanément avec tous ses utilisateurs, tous également détenteurs de ce registre, et qui ont également tous la capacité d’y inscrire des données selon des règles spécifiques fixées par un protocole informatique très bien sécurisé grâce à la cryptographie ».
Concrètement ? Christophe Carminati, co-fondateur de la société Contractchain, nous éclaire en vulgarisant le concept : « La, ou plutôt les blockchain, sont des moyens de stocker, non pas une donnée à la différence des serveurs, des data-room et des archivages numériques, mais des preuves d’intégrité de celle-ci (rendant donc les données confidentielles). Ces preuves, qui certifient la donnée en les horodatant, prennent la forme d’empreintes numériques obtenues à la suite d’un codage informatique. Elles ne sont lisibles que si l’on possède la donnée à laquelle elles sont rattachées ».
Encore faut-il savoir coder et être capable de vérifier la donnée par ce biais. Quelques sociétés commencent à émerger sur ce marché en proposant leurs services, constate Jérôme Verny, directeur scientifique de l’institut de recherche en transport et logistique innovante Mobis de Neoma BS (C'est le cas de Contractchain).
 

Vers une sécurisation des échanges

La décentralisation des données  assure leur sécurité : les empreintes numériques insérées dans des milliers de serveurs sont, de fait, inaltérables 

La seconde particularité de la chaîne de blocs, poursuit le dirigeant de Contractchain, est la suivante : « dans les blockchain publiques, les empreintes numériques ne sont pas centralisées : elles sont envoyées sur des milliers de serveurs sur la planète. C’est cette décentralisation qui assure la sécurité des données : puisqu’il est impossible de hacker en même temps et de la même manière des milliers de serveurs. Les empreintes numériques qui y sont insérées sont considérées de fait comme inaltérables ».

La blockchain n’est pas une finalité, mais un simple outil de sécurisation. Le rapport parlementaire considère cette technologie comme un moyen d’assurer la traçabilité des produits, notamment dans le domaine agroalimentaire, et y apporterait davantage de transparence. L’enjeu est de connaître avec certitude leur provenance, d’autant plus importante s’il s'agit de produits alimentaires utilisés, par exemple, dans les cantines scolaires. Dans le cas d’usage de la traçabilité des produits, la chaîne de blocs pourrait être utilisée dans le cadre d’une plateforme collaborative qui graverait dans la blockchain chaque étape de fabrication, transformation ou transport des produits, précise Christophe Carminati. « Chaque phase serait ainsi horodatée, permettant aussi un suivi en temps réel ».
 

Vers une connaissance de la chaîne d’approvisionnement


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Dans un marché de fruits et légumes, l’acheteur connaîtra les maraîchers et éventuellement les grossistes et les transporteurs : il pourra suivre les commandes de l’entreprise titulaire du contrat auprès de ses fournisseurs, et celles de ces derniers avec leurs prestataires

Pour y parvenir, Jérôme Verny invite les acheteurs à réaliser une cartographie des acteurs qui seront impliqués dans l’exécution du marché, à la fois internes (prescripteur, service financier, direction…) et externes (prestataire, grossiste, transporteur, producteur…), et à définir leur relation entre eux et avec le pouvoir adjudicateur. Autrement dit, à s’intéresser à la chaîne d’approvisionnement. Ensuite de la retranscrire à l’intérieur de la plateforme : les acteurs, leurs rôles et toutes les étapes de la production jusqu’à la livraison au client final.
Le professeur de Mobis de Neoma BS illustre ses propos : « Dans un marché de fruits et légumes, l’acheteur, avec cet outil, connaîtra les maraîchers et éventuellement les grossistes et les transporteurs. Il pourra suivre les commandes de l’entreprise titulaire du contrat auprès de ses fournisseurs, et celles de ces derniers avec leurs prestataires ». Cela facilite aussi le contrôle de la conformité des prestations aux marchés.
Effet de la blockchain : une fois l’information renseignée, par les acteurs concernés, il n’est plus possible de la modifier.

S’agissant de la création et de la maintenance de la plateforme, deux solutions s’offrent à l’acheteur, souligne Christophe Carminati : « Si le pouvoir adjudicateur maîtrise son process, alors il saura rédiger une expression de besoin destinée à développer informatiquement une plateforme ad-hoc. Si ce besoin peut être rattaché à un cas d’usage plus large et qu’il existe des opérateurs aptes à répondre à celui de la personne publique, alors il sera possible d’acheter ou de louer la prestation à une entreprise spécialisée ».

Quoi qu’il en soit, selon Jérôme Verny, dans une optique de transparence des politiques publiques, la blockchain sera l’outil de demain (entre autres) des acheteurs publics.



Rapport Assemblée nationale n° 1501 sur les chaînes de blocs (blockchains)