Indemnisation du préjudice en cas d’éviction irrégulière

  • 25/07/2011
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La DDE de l’Allier a lancé en janvier 2006 un appel d’offres ouvert pour la réalisation des chaussées de la déviation de Lamaids, sur la section Montluçon Creuse de la RN 145. Le groupement constitué de la société rennaise de travaux publics (SRTP) et la société établissements Brougalay ont remis une offre, qui a été rejetée. Le marché a été attribué à l’entreprise Colas pour sa variante n°1. Elles ont demandé au TA de Clermont-Ferrand, la condamnation de l’État à les indemniser du manque à gagner subi du fait du rejet, qu’elles estimaient illégal, de leur offre, qui leur à accorder la somme de 57 463,68 euros en réparation du manque à gagner qu’elles avaient subi alors qu’elles avaient une chance sérieuse d’obtenir le marché. Insatisfaites quant au montant accordé, elles ont fait appel de la décision. La CAA de Lyon rappelle que « l’article 2.5 précité du règlement de consultation obligeait les candidats à maintenir dans leurs variantes non seulement les matériaux bitumineux mais également la couche de surface de la solution de base et faisait obstacle à ce que fût examinée une solution qui aurait différé, sur ces deux points, des spécifications du cahier des clauses techniques particulières ; que s’agissant des bretelles d’échangeur et du giratoire, l’article 1.3.2.2 du cahier des clauses techniques particulières prescrivait de réaliser la couche de surface, qui comprend la couche de liaison et la couche de roulement, par l’emploi de béton bitumineux semi-grenu, sur une épaisseur de 6 cm, recouvert de béton bitumineux très mince sur une épaisseur de 2,5 cm ; qu’il résulte de l’instruction que, dans sa variante n°1, la société Colas proposait, pour la chaussée des bretelles, la mise en oeuvre, sur une épaisseur de 6 cm, d’une seule couche de béton bitumineux très mince ; que cette offre ne répondait ainsi pas aux exigences posées par l’article 2.5 du règlement de consultation et l’article 1.3.2.2 du cahier des clauses techniques particulières ; que la circonstance que l’attributaire aurait utilisé un liant novateur et plus performant que les procédés traditionnels ne lui permettait pas, pour autant, de s’affranchir de la structure de chaussée imposée aux candidats ; que, par suite, la personne responsable du marché ne pouvait légalement attribuer le marché à la société Colas ». Elle ajoute « qu’il résulte de l’instruction que la comparaison des offres, selon les deux critères pondérés du règlement de consultation, a conduit la commission d’appel d’offres à classer la solution de base du groupement formé par la SRTP et la société établissements Brougalay comme économiquement la plus avantageuse, juste après la variante n° 1 de la société Colas ; que cette dernière, non conforme, ne pouvant être prise en compte dans l’analyse des offres, les entreprises ont perdu une chance sérieuse d’emporter le marché de la déviation de Lamaids ». La cour estime donc que « les requérantes ont droit à l’indemnisation de l’intégralité du manque à gagner en résultant pour elles, excluant le remboursement de frais d’immobilisation de personnel et de matériel dont elles ne justifient pas qu’elles auraient eu, en l’absence de qualité d’attributaire du marché, des raisons légitimes de les exposer ; que leur préjudice doit être déterminé en fonction du bénéfice net que leur aurait procuré le marché si elles l’avaient obtenu […] ; que dans ces conditions, compte tenu du montant de l’offre du groupement, il sera fait une juste appréciation du manque à gagner total subi par les sociétés en l’évaluant à 100 000 euros ».

CAA lyon, 21 juin 2011, n°09LY02978