Cap sur le management des achats du secteur public dans les Mastères de 2020

Info du jour

 23/04/2020
 Mathieu Laugier

A la rentrée 2020-2021, deux mastères spécialisés dans le management de l’achat public devraient accueillir ses premiers apprenants. Au programme, à côté des traditionnels cours sur le droit de la commande publique, un volet économique particulièrement dense, avec des aspects sociaux et environnementaux. Des formations destinées essentiellement aux professionnels qui souhaitent être diplômés mais aussi "performer" dans leurs achats…

Le management des achats dans le secteur public se fait une place dans l’enseignement. Deux Mastères 2 spécialisés voient ainsi le jour : Performance des achats publics de l’Ecole supérieure de logistique industrielle (ESLI), et Formations en achat public de l’Institut supérieur de l’achat public (ISAP).
Ces cursus, qui devraient être limités à une vingtaine d’apprenants, sont destinés plutôt aux professionnels. Même si des étudiants peuvent s’y inscrire. Un diplôme niveau bac +5 ou une certification équivalente leur seront délivrés, à condition d’avoir réussi leurs examens et rendu un mémoire au cours de l’année. Le coût de l'inscription varie selon les modalités d'entrée (formation initiale, continue, VAE). Les cours débuteront (en principe) cet automne à l’ISAP, et en janvier 2021 à l’ESLI. Les enseignements se dérouleront à Paris. Le premier est le fruit d’une équipe de consultants, d’économistes et de spécialistes des marchés publics. Le second a été monté en collaboration avec des collectivités territoriales et les ministères des Armées, de l’Intérieur et de la Transition Ecologique et Solidaire. La formation de l'ESLI vient de recevoir le prix de l'Innovation 2020 (Eduniversal).

Du juriste à l’acheteur dans le secteur public

Les formations classiques sur les marchés publics n’apprennent pas à leurs étudiants ou stagiaires à avoir une approche TCO, à faire du sourcing, à négocier et à gérer les fournisseurs

Les nouveaux Mastères 2 se caractérisent par un volet économique prépondérant dans leurs programmes. Les cours de droit de la commande publique y sont minoritaires. L’objectif n’est pas de former des juristes, mais des acheteurs, au sens littéral du terme, à entendre les responsables de ces cursus. « Les formations classiques sur les marchés publics n’apprennent pas à leurs étudiants ou stagiaires à avoir une approche TCO (coût total de possession), à faire du sourcing, à négocier et à gérer les fournisseurs », considère Xavier Robaux, Président de l’ISAP et dirigeant de la société de conseil ERICS Associés. Il existe donc une carence dans ce domaine. « Il faut donner aux acheteurs publics des clés afin qu’ils développent une vision stratégique de la commande publique », explique pour sa part Thierry Sauvage, directeur de l’ESLI.

La crise liée au Covid-19 montre l’importance pour un pouvoir adjudicateur de s’intéresser à la chaîne d’approvisionnement

Les deux formations mettent l’accent sur la maîtrise et la décomposition des coûts et la connaissance de l'environnement économique. La crise actuelle liée au Covid-19 montre l’importance pour un pouvoir adjudicateur de s’intéresser à la chaîne d’approvisionnement. « Il doit faire un état des lieux des marchés sur lequel il va s’approvisionner. Or la plupart des collectivités connaissent seulement leurs fournisseurs de rang 1. Elles ne font pas de management dans une perspective de supply chain », pointe Mathilda Desgres, chargée de programme du Mastère de l’ESLI. L'aspect "responsabilité sociétale des entreprises" est également étudié.
Par ailleurs, les exercices de négociation sont au cœur de ces dispositifs, afin que les apprenants soient davantage performants lors des échanges avec les fournisseurs (consulter, en pièce-jointe les parcours proposés par ces deux cursus).

La formation achat dans le privé

Le métier d'acheteur souffre toujours d'un déficit de notoriété auprès de la jeunesse ; pourtant, les embauches peuvent être intéressantes financièrement

Les achats du secteur privé, de leur côté, ont opéré leur mue depuis plusieurs décennies. Le Master E-achat de l’Université de Franche-Comté est créé au début des années 2000, dans un contexte où la fonction achat devenait une fonction stratégique au sein des (grandes) entreprises, relate François Cochard, professeur de sciences économiques, et responsable de ce diplôme (M2). « La vocation de ce cursus (comprenant une vingtaine d’étudiants) est de former des directeurs achats, c’est-à-dire des professionnels qui vont participer à la direction de l’organisme », explique-t-il.
Un acheteur doit comprendre le fonctionnement des marchés (l'offre et la demande) et l’impact des politiques publiques sur les achats. Ensuite, il est essentiel qu’il sache faire une étude financière, une analyse de valeur et une décomposition des coûts. Enfin, le savoir-faire relationnel est une compétence qu’un acheteur doit développer. « Il est en contact en permanence avec les services prescripteurs, la direction et les fournisseurs », rappelle le directeur. Des exercices de négociation sont là aussi prévus.
A la sortie du Master, une poignée d’étudiants occupe des fonctions achats au sein d’entités parapubliques ou publiques, explique François Cochard. Mais « le métier d'acheteur souffre toujours d'un déficit de notoriété auprès de la jeunesse. Pourtant les embauches qui sont derrière peuvent être intéressantes financièrement », conclut le professeur.